On apprend le 3 septembre que la livraison par
l’industrie française (en l’occurrence les Chantiers Navals de l’Atlantique)
d’un porte hélicoptères à la Russie, qui devait avoir lieu début octobre, est
suspendue, au prétexte que « les conditions n’en sont pas réunies ».
On suppose que ces conditions concernent l’attitude de la Russie dans le
conflit de plus en plus meurtrier qui se déroule sur le sol ukrainien.
Aussitôt après cette annonce, qui précède de peu la
réunion au Royaume Uni des dirigeants de l’OTAN, nos chers alliés Etats-Unis et
Royaume Uni se sont félicités de la décision française. Gageons qu’au sein de l’Union
Européenne, et surtout dans les pays baltes le même sentiment prévaut.
L’enthousiasme est beaucoup plus modéré dans notre
pays pour des raisons évidentes.
La première est que cette décision va à l’encontre d’une
annonce précédente faite par le même chef de l’Etat, ce qui donne ou confirme
une impression fâcheuse d’indétermination dans la conduite des relations
internationales.
La deuxième est que les conseilleurs ne sont pas les
payeurs et que les énormes coûts directs mais aussi indirects de cette « décision »
ne seront pas supportés par ceux qui applaudissent, mais par la France seule
(indemnités de retard, voire annulation de commande et remboursement, perte de
futurs marchés, etc).
La troisième est que l’état lamentable de notre
tissu industriel fait aujourd’hui consensus et que cette attitude a toutes les
chances de mettre à mal un des derniers pans encore debout de notre industrie,
avec la perte d’emplois, de savoir faire et d’indépendance nationale qui en
sont les corollaires.
On peut ainsi se poser légitimement la question de
qui décide réellement pour la France ? S’agit-il de nos amis européens, c’est-à-dire
essentiellement de l’Allemagne ? S’agit-il de nos alliés atlantiques, c’est-à-dire
essentiellement les Etats-Unis ? Dans les deux cas, elle est loin l’image
de la France indépendante, libre de ses choix et souveraine, qu’a représenté en son temps le
général de Gaulle. Elle devient la dernière roue du carrosse qui perd tous les
jours des rayons supplémentaires.
Constat particulièrement déprimant qui ne peut qu’aller
à l’encontre de l’état d’esprit nécessaire au redressement national que tout le
monde souhaite sans en ressentir le souffle.