La Banque Centrale Européenne, conçue comme le
gardien du temple de l’euro fort et de la protection contre l’inflation, semble
avoir vécu.
Depuis sa création, cette institution européenne a
été dirigée dans l’esprit de sa création en 1998 par des gouverneurs (ou
présidents) qu’il s’agisse de Duisenberg ou de notre compatriote Trichet, soucieux
de respecter les principes d’indépendance et de lutte contre l’inflation.
Doté, depuis le traité de Lisbonne de la
personnalité juridique, cet objet semblait pouvoir être dirigé par des
ordinateurs programmés en Allemagne avec l’aide des libéraux de tous les pays
de la zone euro, insensibles aux effets dévastateurs d’une crise de la dette
européenne sans précédent.
Voici que le mandat de l’ineffable Jean-Claude
Trichet prend fin en 2011, au beau milieu d’une crise qui a beaucoup mis à mal
ses certitudes et où il a dû faire quelques entorses au dogme de la non
intervention. Il a cependant donné des gages aux libéraux en n’ayant comme
interlocutrices que les banques, auxquelles il a accepté que la BCE prête à des
taux très bas, afin que celles-ci puissent ensuite prêter aux états en faisant
au passage un joli bénéfice.
On s’attendait à ce que le vice-président Draghi,
qui lui a succédé, se comporte de la même manière. Mais celui-ci vient d’utiliser
l’autonomie donnée à son Pinocchio d’acier par les traités pour lui donner une
vie propre en s’opposant à Gepetto-Merkel. La décision de prêter directement
aux états, réclamée par les pragmatiques et refusée a priori pas les
dogmatiques de tout poil, est le signal du réveil donné par Mario Draghi.
Les
spéculateurs à grande échelle voient leur corne d’abondance se vider et
personne ne devrait s’en plaindre. Même Gepetto-Merkel fait contre mauvaise
fortune bon cœur. Il est vrai qu’elle a perdu son meilleur soutien en Europe
lors de la dernière élection présidentielle française et qu’il est difficile de
jouer à un contre tous.
Il va de soi que les problèmes ne sont pas résolus
par le coup de baguette magique de la BCE, mais on sait maintenant que l’arme
monétaire peut être utilisée pour redonner du souffle aux économies en
récession et de l’espoir aux peuples concernés.
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