vendredi 6 avril 2012

Demandez le programme !


Dans la dramaturgie de la campagne électorale, on assiste à ce que les metteurs en scène de ce spectacle doivent considérer comme étant un crescendo jusqu’à l’affrontement du premier tour. Entre les deux tours, l’essentiel du scénario se passe en coulisses et il n’y a guère que la grande scène finale du débat entre les survivants, qui précède l’épilogue.

Donc, dans le crescendo auquel nous assistons, il a d’abord été question d’un côté de moquer la soi-disant mollesse de l’adversaire désigné, en même temps que l’on faisait en sorte d’étouffer dans l’œuf les velléités de candidature dans son camp. De l’autre côté, on comptait bien sur un phénomène de rejet massif du sortant, tout en dévoilant partiellement au travers des primaires, les grands thèmes susceptibles d’être abordés. Des deux côtés, on ignorait superbement les éventuels trouble-fête, empêcheurs de débattre entre nous, tout en donnant des signes à leur électorat pour ne pas insulter l’avenir.

La phase suivante pourrait s’appeler « l’entrée en campagne ». Comme si jusque là ce qui avait été dit et fait n’avait rien à voir avec la campagne électorale. Pourtant, qu’il s’agisse des déplacements sur le terrain de celui qui pouvait utiliser les moyens de l’Etat, ou du traitement médiatique exceptionnel de la primaire socialiste, il semble bien que celle-ci était entamée depuis longtemps (voir sur ce blog l’article « La campagne électorale aurait donc commencé ? »). Cette phase devait signer la fin des candidatures de témoignage. Les grands meetings (Le Bourget d’un côté, Villepinte de l’autre) ont été l’occasion d’affirmer les valeurs sensées sous-tendre l’action et les propositions des impétrants : la barre bien à droite d’un côté, bien à gauche de l’autre.

En effet, les candidatures de témoignage ont disparu pour des raisons officielles diverses et avec un débouché plus ou moins glorieux. Mais les trublions ont persisté dans leur hérésie et se sont accrochés. Il en est même un qui est allé défier le duo sur son terrain en organisant un énorme meeting en plein air, qui lui a valu d’être pris au sérieux par les observateurs, mais aussi par des abstentionnistes potentiels.

Nous sommes aujourd’hui dans la troisième et dernière phase programmée, l’acmé de la campagne : la présentation détaillée des programmes. Aux meetings de circonstance viennent s’ajouter un livret avec soixante propositions d’un côté et une « lettre aux français » de l’autre (François Mitterrand avait déjà pratiqué l'exercice). Dans le grand show d’annonce, le sortant a, pour l’essentiel, parlé de son concurrent et évoqué une mesure phare consistant à avancer de huit jours le paiement des pensions de retraite. Au-delà, il a promis l’austérité à perpétuité, garantie par le respect scrupuleux des injonctions de la machine à contraindre européenne. L’outsider officiel mais favori des sondages a, lui, préféré proposer un calendrier serré de mise en œuvre de mesures urgentes et symboliques, comme le blocage temporaire des prix des carburants et l’augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, étant dans l’impossibilité de dévoiler les tortures qu’il devra appliquer à notre partenaire allemand pour lui faire entendre raison sur le financement des dettes souveraines et la nécessité d’une croissance forte pour sortir de la crise.

Quand on observe le déplacement massif de citoyens dans les réunions en plein air faites par celui qui est désormais appelé le troisième homme, on se dit qu’il est possible que le scénario initial doive subir quelques réajustements de dernière minute.

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