lundi 23 avril 2012

Quelle surprise ?


Nous l’avons désormais, le résultat du sondage grandeur nature. Aux erreurs de vote utile près, il confirme que la surprise que devait créer le sortant n’aura été que pour lui, qui pensait sortir en tête de ce premier tour de piste. Il s’agit donc bel et bien d’une confirmation de son discrédit personnel au-delà du discrédit de la mouvance politique dont il est le chef naturel. Ses remerciements émouvants aux groupies présents à la Mutualité sonnaient comme un adieu à la belle aventure commencée il y a cinq ans et contrastaient avec le discours volontariste qui avait précédé. Les trois débats demandés à son concurrent ressemblaient à l’attitude du joueur qui fait tapis au poker. Le pathétique de la situation n’a échappé à peu près à personne.

Deuxième soit disant surprise, celle du taux de participation. Si surprise il y a eu un jour, c’est en 2002, lorsque les français ont manqué d’enthousiasme pour soutenir les candidats qui étaient présentés comme devant franchir sans encombre le premier tour et qui n’avaient en conséquence pas fait de campagne sérieuse, ouvrant un boulevard au Front National, qui depuis toujours a rejeté le consensus national pour une bipolarisation autour de l’UMP et le PS. Le taux de participation du premier tour de 2012 est conforme aux taux habituels et n’est donc pas une surprise.

Troisième surprise supposée, le score de Marine Le Pen. Il est vrai que le pourcentage réalisé par la candidate est important, mais signifie-t-il pour autant que le nombre de xénophobes viscéraux ou de nostalgiques du fascisme soit en augmentation dans le pays ? Sûrement pas. Au lieu d’agiter l’épouvantail de l’extrême droite, les responsables politiques feraient mieux de se demander pourquoi lorsqu’on ajoute ce résultat, celui de l’extrême gauche, celui de Dupont-Aignan et celui de Mélenchon, on arrive à un tiers des votants. Sans compter les abstentionnistes par conviction et les non inscrits par conviction également.

On doit chercher une explication à cette réalité sans stigmatiser les citoyens concernés, et cette explication est assez simple : le refus de l’impuissance devant une évolution présentée comme inéluctable vers des inégalités toujours plus grandes, un emploi toujours plus rare et une insécurité corrélative en constante augmentation. Les citoyens perçoivent l’incapacité de la classe politique dominante à s’opposer à la pression des oligarchies qui ont de facto le pouvoir et qui ne s’embarrassent pas de frontières pour conserver voire accroître leur patrimoine grâce à la mondialisation du capitalisme et de la finance.

La traduction la plus évidente de cette domination est la façon dont l’Union Européenne se construit, quelles que soient les couleurs politiques des partis de pouvoir dans les pays qui la constituent. Il n’est donc pas étonnant que celle-ci soit montrée comme l’origine des difficultés rencontrées par la plupart d’entre nous. Le peuple perçoit le dessaisissement volontaire de ceux qui le gouvernent d’un pouvoir laissé à des institutions non élues qui jouent le jeu des oligarchies. Les élus semblent se contenter de leur situation confortable et ne se préoccuper que de leur réélection, ce qui les rend haïssables pour leur éloignement supposé des préoccupations quotidiennes vitales du petit peuple. Les slogans incluant la reprise du pouvoir ont ainsi trouvé un écho auprès des gens qui souffrent de cette situation.

Donc, plutôt que de parler de surprise, il vaudrait mieux parler de confirmation d’un état de fait qui ne pourra pas durer longtemps, comme on peut le voir dans les pays les plus touchés par les effets de la crise. Espérons que cet appel au secours soit entendu par celui qui est désormais seul à porter les espoirs des désespérés.

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